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23 janvier 2005

Tribune libreHandicapés : une loi pour rien ? Par

Tribune libre
Handicapés : une loi pour rien ?

Par Jean-Christophe Parisot,

président du Collectif des démocrates handicapés.

Vivre handicapé dans la France de 2005 est une grande épreuve. Nous sommes depuis des décennies privés de liberté. Notre « mise à part » à nous, citoyens différents, a commencé lors de notre naissance, après un accident, une maladie, avec la captivité de la mobilité réduite, de l'immobilité, de la cécité, du trouble sensoriel ou psychique. Nous sommes aujourd'hui 5 millions dans notre propre pays à espérer une loi « de libération ». Jamais depuis la Première Guerre mondiale nous n'avons été aussi nombreux.

Face à l'incompréhension, la timidité des aides, la complexité des situations, nous dénonçons aujourd'hui le risque d'une loi « bonne conscience » sur le handicap qui ne nous projetterait pas dans les trente prochaines années mais voudrait donner l'impression d'agir.

Nos lieux de vie à nous sont nos centres médico-sociaux, IME, MAS, CAT... pour les plus chanceux puisque plus de 4 000 d'entre nous ont dû se réfugier en Belgique, faute de places en France. Nos allocations ne nous permettent qu'une vie difficile, sans moyen de lutter contre notre exclusion de la cité, de ses transports, de la vie sociale, culturelle et politique. Nous ne pouvons voter que dans certaines mairies, ne suivre que certaines émissions à la télévision, n'acheter que dans certains magasins. Notre pays est un labyrinthe pour ses ressortissants handicapés aux yeux d'un visiteur anglo-saxon ou scandinave. Être citoyen handicapé en France, c'est vivre sans accès véritable à l'outil de travail (une entreprise sur trois nous rejette, 12 000 cadres handicapés titulaires d'un bac +2 sont au chômage), avec un accès restreint à l'école (40 000 enfants rejetés chaque année), des structures médico-sociales souvent archaïques.

Nous sommes de plus en plus nombreux (car nous vivons de plus en plus longtemps) et nous devons nous partager des budgets en constante diminution qu'un lundi de Pentecôte ne saurait inverser. Ce geste à la frontière du paternalisme ne suffira pas. En 1989, la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs proclamait une nouvelle fois le droit des personnes handicapées à bénéficier de mesures d'intégration professionnelle et sociale passant par la formation professionnelle, l'ergonomie, l'accessibilité, la mobilité, les moyens de transport et le logement. Les débats de 2004 sur le handicap ont soigneusement occulté l'évaluation des ressources nécessaires à ces politiques, effort qu'on évalue à une dizaine de milliards.

Au début du quinquennat, le président Chirac nous avait promis un grand chantier. Après deux ans d'attente, Mmes Boisseau et Montchamp, deux inconnues du monde politique et associatif, ont eu pour feuille de route de rénover une loi mais avec un budget minimum (800 millions d'euros, soit 15 euros par mois par personne handicapée).

La menace d'un début de grève de la faim d'un chanteur populaire a certes permis une avancée à l'arraché sur le dossier des retraites, mais quel contraste entre cet Hémicycle déserté lors de l'examen du texte et les milliers de familles abandonnées, victimes d'une tragédie sociale, et ces parlementaires valides qui ont déserté les débats à la veille du réveillon.

Le Collectif des démocrates handicapés dénonce un chantier présidentiel marqué par la méconnaissance des besoins et des attentes réelles des citoyens handicapés, une secrétaire d'État qui avoue découvrir le sujet en plein examen du texte et qui oppose l 40 dès qu'il s'agit d'augmenter l'effort de la nation, un Parlement tenté de devenir une chambre d'enregistrement, des associations inaudibles et désunies qui ont traduit l'espoir des personnes handicapées en déception collective.

En débattant du handicap, les représentants du peuple ont-ils vraiment compris que la situation de dizaines de milliers de personnes handicapées et de leur famille était dramatique ?

La deuxième lecture du texte de loi s'est distinguée par la médiocrité de sa méthodologie et de ses propositions (accessibilité, hébergement, représentativité, revenus, CAT...). Trop d'amendements ont été apportés en dernière minute, des groupes de travail prévus pour « l'après-loi », l'amendement About ouvrant une porte aux associations non gestionnaires d'établissement et l'article 2A garantissant une aide vingt-quatre heures sur vingt-quatre aux citoyens les plus dépendants ont été repoussés par le gouvernement.

Cette loi qui aurait dû être un grand chantier sera probablement un échec collectif car elle a été faite sans débats publics dans les régions (comme ce fut le cas sur la décentralisation ou l'école), et la plupart des décisions stratégiques ont été renvoyées à d'improbables décrets.

Le droit à compensation risque d'être un habile rhabillage de ce qui se faisait avant puisque la part du PIB consacrée au handicap reste la même. La maison du handicap sera-t-elle plus qu'un relookage de la COTOREP et des CDES aux frais des départements ? En attendant, les parents d'enfants autistes réclament toujours des secours et des milliers de polyhandicapés vivent une tragédie quotidienne.

L'ampleur croissante du problème aura vite fait de faire oublier l'autosatisfaction des rédacteurs du texte. Trop de citoyens handicapés se sentent humiliés par la timidité de quelques associations historiques qui ont préféré troquer le statu quo et l'enfermement à une ouverture des portes de la cité et de l'autonomie.

Le CDH continuera pour sa part à réclamer un vaste plan quinquennal au profit des citoyens handicapés toujours retenus en otages par indifférence et tiédeur politique

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  • Je m'appelle Philippe, j'ai 57 ans, je suis handicapé de naissance mais à part cela, tout roule. Je vous ferais découvrir mes joies , mes rires et mes coups de gueules sur l'actualité du moment. Cela dépend du moment.
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